La politique est l’art de diriger un pays, saupoudré d’un amour indécent pour les convenances et épaissis à grand renforts de non-dits et de mensonges.
Pour ma part, la politique à Kiri se résume à être un bon gestionnaire, à pourchasser les menteurs qui soi-disant, le sont par convenance et à m’assurer que si on ne dit rien, tout le monde comprend. Une manière plus crue d’énoncer les faits, serait que là où d’autres ont choisi de s’encombrer de remords et de scrupules, je ne m’embarrasse que d’une éthique. J’ai appris à aimer le village de l’eau et à le protéger, même si parfois, les institutions sont malades et les esprits agités.
Pour être tout à fait honnête, c’est à peu près ma seule raison d’être venu ici. Les dialogues tournent en ronds et chacun n’en fait qu’à sa tête : Konoha s’est enrichie grassement avec les guerres contre Iwa, le village de la Terre cherche la dignité qui lui a été volé et Kumo veut maintenir le statuquo. Suna est un village opportuniste qui voit ses intérêts avant son honneur et de ce fait, je considère que nous ne sommes pas en hostilités. Nous sommes juste « non hostiles », la paix ne veut rien dire avec eux, la guerre non plus. Il est juste question de vivre côte à côte sans se fâcher. J’aurais encore du venin à cracher, mais la fatigue des réunions m’a laissé avec des raideurs dans la nuque. A écouter les éminences des différents pays s’adresser les uns les autres avec tout le faste diplomatique…
On a compris. Tu peux l’admettre, tu détestes leur maniérisme et tu as disparu sous les yeux médusés de Kisame.
Oui Sanbi, tu as raison.
Ce n’est pas la politique qui me dérange, c’est le maniérisme et les non-dits qui parcourent l’assemblée. À courtiser les Daimyo, la noblesse, les différentes factions à l’intérieur de chaque village. Tout ce cérémoniel prend du temps, lorsque les réunions concernent les plus hautes sphères des pouvoirs, il faut distraire les autres. De la danse, du théâtre, du thé, j’ignore encore si je suis ici pour m’amuser ou pour discuter de l’avenir du monde. Car personne ici ne sait de quoi il retourne, au sens premier du terme : il n’est pas question de prédire le futur. Il est question de savoir ce qu’on souhaite de lui : moi-même, j’ignore tout de mes attentes. D’un côté, j’aimerais une paix durable. De l’autre, je veux rebattre les cartes, exaucer les rêves de gloire de mes compatriotes, je suis le Mizukage, j’ai un devoir envers les kirijins. Aussi fou cela puisse paraître, j’aimerais un pays prospère, qui n’ait pas à craindre Konoha ou Kumo. Un pays qui peut faire ses propres choix sans avoir à craindre l’ire des autres nations.
C’est pour cela qu’à la fin des discussions, j’ai pris congé loin de tout. Pour réfléchir un peu, profiter de l’air chaud et sec du désert pour me retrouver seul avec mon esprit. En errant dans les couloirs du domaine qui nous a été réservé, je bute sur une servante qui me propose une spécialité locale de Suna, du thé. Un peu forcé et ne souhaitant pas qu’elle subisse les remontrances d’un quelconque maître de cérémonie, je prends derechef une tasse. Au final, je continue mon chemin et arrive à une terrasse.
Il n’y a personne à l’exception d’une femme au balcon, qui profite de son thé. Une kunoichi de Konoha, je crois l’avoir à un moment, lors d’une réunion mondaine sur les équipes médicales. Qu’importe, je ne peux voir que la jeune femme profitant du calme, en quête d’une discussion paisible, je m’approche d’elle.
Je sens un grand trouble dans ton ki.
Une journée de discussions a pris son dû, je me sens fatigué.
Il va être stupide.
Je me racle la gorge et de ma voix la plus calme ;
« Excusez-moi, il vous reste une place ? » Sanbi éclate de rire. Il n’y a que vous deux, évidemment qu’il reste de la place !