« J'aurais fui le temple avant qu'ils n'aient le temps de te sceller en moi si j'avais su. C'est de ta faute si je me retrouve dans une telle situation, saleté de macaque. » En guise de réaction, le jeune homme n'obtient d'abord qu'un jacassement de la part du singe, tellement habitué à son manque de respect qu'il ne relève même pas le terme par lequel il a été appelé. « A quoi t'attendais-tu en tant que réceptacle, hum ? Prépare-toi à voir la vieille Balance te déployer sur tous les terrains dès que possible. » Répond celui-ci entre deux rires. Une dizaine d'années que leurs deux âmes sont liées, mais leur entente est toujours aussi conflictuelle. Chacun n'hésite pas à lancer des piques à l'autre dès que l'occasion se présente. « La pause est finie, Akihito, magne-toi ! » Le Jinchûriki jure si fort intérieurement que la bête qui sommeille en lui en jubile. Confiné à l'intérieur d'un corps dont il ne peut se défaire, se délecter de l'ennui de son hôte est l'unique passe-temps dont il ne se lassera jamais. Un énième soupir d'exaspération quitte ensuite ses lèvres avant qu'il ne se lève du rocher sur lequel il se reposait pour rejoindre le reste du groupe en traînant les pieds. Silencieux, le moine ninja maudit secrètement Ônoki et tous les crétins qui lui servent de conseillers pour l'avoir forcé à rejoindre le régiment qui se charge d'assiéger Kusa. Tout cela dans le seul but d'étendre leur influence et de se rapprocher un peu plus de Konoha, à croire qu'ils n'ont pas déjà suffisamment perdu face à la Feuille au cours des trois précédentes guerres. La différence entre les conflits d'avant et ceux de maintenant est qu'Akihito y participe, ce qui lui déplaît au plus haut point. Qu'ils s'amusent à se mettre des bâtons dans les roues si ça leur chante, mais qu'ils ne le mêlent pas à leurs enfantillages.

La route entre Iwa et le Pays de l'Herbe est longue, ce qui laisse tout le temps au dénommé Souhei pour se lamenter et ainsi exaspérer ses partenaires de mission. Il reconnaît certains visages avec lesquels il a déjà coopéré par le passé et d'autres qu'il ne connaît que de réputation. Les plus expérimentés d'entre eux lui reprochent son manque de sérieux en lui rappelant à quel point leur quête est importante pour que leur patrie retrouve ses lettres de noblesse. Le jeune Jônin n'en a cependant que faire. Pour lui, la tâche qui a pris des heures à être expliquée peut se résumer très facilement en deux grandes idées : se bagarrer avec des inconnus et subir les remontrances de vieillards à la rancune extrêmement tenace, même après presque deux décennies depuis leur dernière défaite. « Décidément, c'est fou comme j'la sens pas cette mission. » Au plus l'escouade avance et au plus les étendues rocheuses, propres à leur pays, laissent place à de la verdure, signe qu'ils ne sont plus très loin des frontières. Les silhouettes des premiers postes de sécurité se font alors plus nettes, bien que le nombre d'occupants reste encore relativement abstrait à cause de la distance qui les sépare. Le jeune adulte ne pense cependant pas se tromper en supposant que leur comité d'accueil sera constitué d'individus bien plus dangereux que de simples Genin tout droit sortis de l'académie. Yonbi, lui, semble profiter du calme avant la tempête pour s'assoupir un moment. Sans doute a-t-il déjà anticipé que ses capacités risquent d'être grandement sollicitées au cours de la mission.

La marche est interrompue une dernière fois pour permettre aux Jônin du groupe de finaliser le plan. C'est ainsi que le dénommé Souhei se retrouve malgré lui à encercler une carte de la zone avec ses pairs. Diverses croix de couleurs différentes, chacune symbolisant une utilité particulière, sont affichées sur la fine ligne qui sépare le Pays de la Terre de celui de l'Herbe. Assis sur un rondin trouvé à proximité et son bâton posé contre l'une de ses cuisses, le moine guerrier écoute d'une oreille distraite ce que chacun a à dire sur la situation. La plupart des questions sont posées à une grande kunoichi dotée d'un drôle de cache-œil. Tout porte à croire que celle-ci connaît bien mieux l'environnement qu'ils s'apprêtent à envahir que les autres. Alors, l'hôte du singe écarlate imite ses collègues en adressant les interrogations présentes dans son esprit à celle qui doit bien le dépasser d'une bonne vingtaine de centimètres. « Hey, toi. » Qu'il lâche de son habituelle voix insolente, tout en haussant le ton suffisamment fort pour attirer l'attention de la principale concernée dont le nom lui est encore inconnu. Ou peut-être qu'ils se sont déjà croisés, mais qu'il l'a tout simplement oubliée, allez savoir. Bouarf. Ce ne sera pas la première fois que cela lui arrive de toute façon. « C'est toi qui es partie en reconnaissance la dernière fois ? T'as bien une ou deux informations à nous partager du coup, pas vrai ? » Sur d'éventuelles failles dans leur sécurité, les moyens dont ils disposent pour se défendre, ... Bref, n'importe quoi d'utile pour leur permettre de rentrer le plus tôt possible.

La cheffe des opérations n'a visiblement pas apprécié sa façon de l'aborder et il ne comprend pas pourquoi, mais les traits fatigués de son visage ne changent pas. Ses remarques ne provoquent pas la moindre réaction d'étonnement chez lui. « Rien que ça, hum ? » Elle pourrait tout aussi bien être la fille héritière du Seigneur de la Terre que cela ne changerait absolument rien à la façon dont il l'aborderait. Personne n'a jamais réussi à obtenir son respect simplement en exposant fièrement son grade de la sorte, il est même fort probable qu'il oublie tout ce qui vient de lui être révélé tant il porte peu d'intérêt pour ce genre de choses. Quelques collègues ayant déjà collaboré avec lui par le passé soupirent en constatant la rapidité avec laquelle le moine-ninja a réussi à se faire remarquer. Le principal concerné, lui, ne voit absolument pas ce qu'il a fait de mal. Il a simplement cherché à se renseigner pour être le plus efficace possible, en bon élève qu'il est, et s'en est pris plein la face en retour. A travers sa question, le jeune homme saisit parfaitement que son attitude ne plaît pas à son interlocutrice, mais tant pis, elle finira par s'y faire, comme tout le reste de son entourage. « Je pense que mon jeune âge parle de lui-même. C'est p'têtre moins facile à le deviner quand on ne regarde qu'avec un seul œil, remarque. » Balance-t-il en haussant les épaules. La mentalité d'Akihito ressemble à celle d'un enfant sur certains points. Chez l'un comme chez l'autre, le filtre qui retient certaines pensées d'être prononcées à voix haute n'existe pas. Ainsi, la seconde phrase du Jônin ne doit pas être prise comme une attaque, mais plutôt comme une simple réflexion de faible importance. Pas sûr que l'éclaireuse l'interprète de la sorte cependant.

Ennuyé par la conversation actuelle, le dénommé Souhei dirige son regard vers les frontières du Pays de l'Herbe, apercevables depuis leur position. Peu importe la difficulté qui se dressera sur leur chemin, ils n'ont pas d'autre choix que de vaincre et remettre son inexpérience en cause n'augmentera pas leurs chances d'y arriver. « Mais t'as pas à t'en faire, mes compétences seront amplement suffisantes pour te sauver les miches si la situation devient trop compliquée de ton côté. » Le réceptacle hausse un sourcil en observant l'un de ses compères se pincer l'arête du nez en soupirant suite ses affirmations. Même si son vocabulaire laisse à désirer et qu'il lui a plus répondu par question d'ego qu'autre chose, ce dernier n'en pense pas moins chacun des mots qui viennent de sortir de sa bouche. Il ne se voit pas faillir à sa mission, aussi ennuyante soit-elle. Puis, son rôle lui semble particulièrement simple, attirer l'attention de l'ennemi est clairement quelque chose qui rentre dans ses cordes. Il a toujours été plus habile dans ce genre de tâches que dans celles qui demande un minimum de discrétion, après tout. Il lui est toujours possible de puiser dans le chakra de Yonbi si les choses se corsent un peu trop à son goût dans le pire des cas. « M'enfin, je n'ai pas fait toute cette route pour me disputer avec la grande cheffe sage et expérimentée que tu es. Et si tu nous expliquais plutôt en détail comment tu souhaites que l'on s'y prenne, histoire que l'on en finisse vite ? Comment est-ce qu'on se charge de la diversion et comment comptes-tu te faufiler à travers les défenses de l'ennemi ? » Et ses yeux rouges se reconcentrent à nouveau sur la vieille au cache-œil. L'hôte du singe à quatre queues montre un minimum d'investissement dans leur quête alors qu'elle ne pense même pas à lui remonter les bretelles une seconde fois, d'autant plus que le temps continue de s'écouler pendant qu'ils se crêpent le chignon et il n'est pas trop dur d'imaginer que chacun a plus intéressant à faire que de passer des heures à se chamailler pour ce qu'Akihito juge être des broutilles.