Parchemin de mission:

C’est une sale journée au port.
Les préparations prennent du retard et les esprits s’échauffent ; dans la zone portuaire, les matelots peinent à réunir tout le matériel qu’il faut pour les débarquements en masse. Cinq navires de guerre, avec des voiles et des rames, des balistes, la guerre n’a jamais été aussi industrieuse qu’aujourd’hui. Loin d’être de simples embarcations, l’armée a pris la décision de sortir de ses menuiseries des bâtiments militaires, profitant du savoir de tout un archipel pour se construire une armada digne de ce nom. Depuis quelques temps déjà, ce n’est plus une question de temps, mais d’organisation pour que les navires ne quittent le port et voguent vers l’ancien village du tourbillon. Hélas, à cause d’embrouilles diverses et variées, la logistique peine à suivre les exigences des équipages et les matelots ne s’y retrouvent plus ; chaque navire accueille une unité différente. Forcément, quand les chasseurs de déserteurs côtoient les éclaireurs ou pire encore, les corsaires, des tensions naissent et les matelots reçoivent ordre puis contrordre et ne savent plus où donner de la tête.
Cinq navires, c’est largement suffisant pour créer la discorde ; le village des brumes a toujours été agité, aujourd’hui ne fait pas exception à la règle.
En tête se trouve le Hoshigaki, nommé en l’honneur du clan de requins et peuplé par ces derniers. Bateau de profil assez bas avec de grandes voiles et de nombreuses rames, c’est le plus petit du cortège, mais aussi le plus rapide. Encore faut-il que les voiles de rechange ne daignent se montrer ; depuis qu’il a fait une sortie en pleine tempête, il est à quai à attendre un remplacement. Au grand dam de sa capitaine, Mion Hoshigaki. Sans compter la passerelle d’abordage qui traîne dans on-ne-sait-quel entrepôt depuis des jours.
Non loin, git en cale sèche le Hozuki, peuplé par les membres du clan éponyme et seul navire qui n’a pas de voile, il attend un nouveau set de rames. Le précédent a rompu lors de la traversée d’un récif particulièrement hostile, même si personne n’ose le dire, tout le monde sait que le capitaine est en faute. Komodo Hozuki, seul matelot à prendre la mer en étant rond comme une queue de pelle, d’ailleurs, il décuve encore, laissant grand soin à ses subordonnés de rattraper ses conneries. De plus, un nouvel éperon ne serait pas de refus.
Le Terumi lui, a des problèmes d’équipage : le clan a fait une donation gracieuse à la marine de guerre pour avoir un bateau à la hauteur de son clan. Il se murmure même que Terumi Mei, la proche conseillère du Mizukage aurait fait des pieds et des mains pour que ça soit un objet d’art. Véritable château ambulant, le navire le plus imposant de toute l’armada se vante même d’avoir une coque plaquée cuivre, avec un pont couvert, protégé par des tuiles de fer. Un navire tortue, conçu pour supporter les jets de lave des Terumi et tout ce que la guerre peut lui infliger. Hélas, être le plus grand ne signifie pas être le plus utile et surtout, la logistique peine à suivre. C’est du ravitaillement en masse qu’il faut pour soutenir l’équipage, soldats comme rameurs. Comme par hasard, le responsable du bateau, Mikado Terumi, s’engueule avec le logisticien en chef.
Contrairement aux autres, le navire amiral de l’armée, le Ryujin ne souffre d’aucun problème particulier. Grouillant de ninjas, la plupart s’évertuent à peaufiner les derniers détails, complètent les inventaires et préparent du matériel supplémentaire. Dirigés par un officier relativement effacé (quand on se souvient de son nom), c’est l’enseigne qui en impose et guide les hommes, une certaine Otsukai. Peut-être aura-t-elle du temps pour résoudre les problèmes des autres ?
Enfin, à quai se trouve le Kira, une trouvaille toute récente de la police de Kiri, qui a récupérée à son compte un bateau pirate. Maquillé en navire de commerce, qui sait ce qu’il se cache à l’intérieur ? Les oinins ne laissent personne approcher et toutes les affaires transitent par un officier de liaison, un type au visage masqué que tout le monde surnomme grêle. Pas un bavard, mais il a la réputation d’avoir la solution à tous les problèmes, quand bien même il a des méthodes expéditives.
C’est au petit matin que Mako arrive dans la zone portuaire, qui s’éveille tout doucement alors que déjà, les matelots s’agitent et font de leur mieux pour les derniers préparatifs. Accompagné de son équipe ou seul, le Mizukage n’a pas fait de différence ; si l’élève veut s’émanciper du maître, grand bien lui fasse, sinon, un peu de musculation intellectuelle fera du bien à l’ensemble de l’équipe.

C’était visiblement Onikiri Mako qu’on avait chargé d’apporter du soutien aux futures opérations qui se profilaient. Le jeune garçon n’était pas réellement doué lorsqu’il s’agissait de politique, mais il savait que prendre Uzu était une réelle bonne chose pour le village. Il connaissait l’art de la guerre malgré son jeune âge, atteindre cette position pour Kiri serait plus que stratégique. Mako lisait tranquillement le parchemin de mission ~ On disait que les préparatifs étaient perturbés pour diverses raisons variées. L’Onikiri souffla du nez, c’était ridicule. Mais ce qui allait être encore plus ridicule, était le fait qu’un enfant d’une dizaine d’année soit envoyé sur place afin de commander des adultes pour qu’ils s’organisent assez rapide. Le matin venait tout juste de se lever et l’Onikiri se tenait seul devant le port, les membres de son équipe n’avait visiblement pas été dépêché sur cette mission, ils devaient probablement avoir mieux à faire, surtout qu’il ne fallait pas déployer beaucoup d’homme pour remettre de l’ordre dans le port. Une mission solo’ et cela suffisait. L’Onikiri n’aurait pas vraiment compris la portée de gâcher d’autres potentiels bras pour venir jouer les chiens de garde.  En arrivant, il fut surprit par le bruit. Tout le monde s’activait, tout le monde s’éparpillait, il pouvait entendre des railleries de toute part. On aurait presque dit une classe à l’académie qui devait se préparer pour un exercice commun en autonomie. L’Onikiri leva légèrement la tête observant tour à tour les cinq navires qui se préparaient.

Le rapide et habile Hoshigaki, le robuste Terumi, l’Hozuki, le déjà prêt Ryujin, ainsi que le discret Kira.


«  Drôle de nom… Surtout drôle d’hommage. » Souffla doucement Mako, il était en train d’avancer essayant de comprendre ce qui pouvait bien retarder le départ des navires et comprendre pourquoi certaines personnes étaient en train de faire perdre des précieuses minutes à Kirigakure no Sato pour des broutilles futiles. Mako se baladait doucement sur le port, levant tour à tour la tête sur chacun des navires afin de détailler attentivement la situation de chacun. Il arrivait déjà comprendre ce qui clochait dans la plupart des cas, l’Hoshigaki était prêt mais impossible de mettre la main sur certaines parties importantes pour la suite de l’expédition, c’était également le cas de l’Hozuki cependant en se baladant Mako avait pu entendre quelques informations au sujet de son capitaine ~  Un possible incompétent vu les commentaires que pouvaient faire quelques matelos sur lui, il était en train de décuver quelques parts dans un coin, détail que l’Onikiri ne louperait pas de noter dans son rapport.

Le ravitaillement d’un navire aussi imposant que le Terumi semblait compliqué, Mako remarquait d’ailleurs une dispute sur le pont. Il soupira un long moment et semblait continuer son tour des lieux. Il n’arrivait pas à concevoir que des personnalités importantes du village puisse s’engueuler comme des enfants compromettant ainsi les objectifs du village. C’était un comportement qui agaçaçait déjà Mako lorsqu’il était avec son équipe, alors sur des adultes qu’il ne connaissait ni d’adam ni de Eve cela était en train de l’énerver au plus haut.

Il leva légèrement le bout de son nez pour observer les autres navires, le Ryujin était prêt. Le Kira quant à lui, véritable mystère. Mako irait y faire un tour plus tard. Pour le moment il avait classé les priorités dans sa tête ~ Il allait se rendre sur le Terumi. Lorsqu’on vint lui barrer la route, l’Onikiri présenta simplement le parchemin de mission afin qu’on le laisse passer faisant finalement face au chef du navire ainsi qu’au logisticien, dressant encore une fois le parchemin de mission pour qu’on puisse le respecter et l’écouter.

« Pour quelle raison le ravitaillement est-il gelé ? » Souffla l’Onikiri avec son timbre de voix neutre.

Les paroles de l’Onikiri jettent un froid sur l’assemblée, Mikado Terumi, capitaine du navire-tortue secoue la tête, sceptique. Depuis quand un môme vient faire le travail de l’administration ? Tout le contraire du logisticien en chef qui se fend d’une brève référence envers Mako, peu enclin à désobéir au Kage, même si sa volonté s’exprime au travers d’un gosse. Le parchemin et le sceau en disent suffisamment, il ne sera pas dit que sa carrière s’arrêtera à cause d’une méprise comme celle-ci.
D’une voix troublée par cette intervention de mauvais présage, le logisticien est le premier à se justifier, rajustant prestement un détail de son uniforme.

« Des soucis avec les cales du Terumi : le capitaine veut contrevenir aux consignes qui lui ont été donné. Il veut faire le plein de biscuit et d’eau potable et négliger le reste de la nourriture embarquée : des poulets en cage, de la viande, séchée, du sucre. Tout ce qu’il faut pour nourrir correctement les soldats et tenir à Uzushio, si le ravitaillement venait à nous faire défaut. En n’emportant que le strict essentiel, il veut faire de la place pour bourrer d’huile incendiaire les niveaux inférieurs du bateau. Pour l’énorme bouche à feu en gueule de dragon à l’avant.
-Le Terumi est un navire de guerre bordel ! » S’exclame son maître. « C’est un élément à part entière de la flotte, il n’est pas conçu pour débarquer des troupes, c’est une forteresse flottante. Il n’est pas question que notre équipage se batte, c’est le rôle de la bouche à feu et des balistes.
-C’est contraire aux ordres de l’armée. » Objecte le logisticien.
« Je suis marin et il fera le plein de munitions.
-Au risque d’en faire une immense bombe à fragmentation ?
-Il doit se battre, il a été conçu pour ça. Demandez à la police secrète si vous voulez des rations en trop, ils ont réquisitionné un navire de commerce après tout. » Simple, basique.

Reste à voir si Mikado est capable de dire la même chose devant un oinin. Le choix est plutôt simple : remplir les soutes d’huile pour que la bouche à feu emporte des munitions supplémentaires ? Ou au contraire, embarquer toutes les rations qu’il faut pour nourrir les hommes ?

« De toute façon, » proteste le capitaine. « Le ravitaillement est là, sur les quais. » Dit-il en pointant du doigt les caisses à côté du navire. « J’aimerais juste que monsieur arrête de me casser les c…
-Fais attention à ce que tu dis, ce n’est pas parce que ta cousine sert le thé au Mizukage que tu dois jouer au mariole !
-PARDON ? »
L’armée n’a jamais été connue pour ses hommes de lettres et de bon sens.

—  Ta cousine a au moins la bonne foi de servir le thé correctement, alors fait ton travail correctement à ton tour. Tu es un marin, tu n’as pas ton mot à dire face à un homme qui a étudié ce genre de situation pour pouvoir prendre les meilleurs décisions possibles, en plus de faire perdre du temps à tout le monde tu es en train de retarder une opération importante et contredire des ordres pourtant très clairs. Tu as un problème de compréhension ou bien ? Ton navire prendra les ressources nécessaires pour entretenir notre armée, comme c’était annoncé au départ.


Souffla doucement l’enfant, lui même ne comprenait pas totalement la situation. Cependant il était clairement sûr d’une seule chose, le logisticien avait étudié ce genre de situation, c’était à lui de savoir ce qui était bon ou mauvais dans ce genre de cas. Le marin avait été formé pour autre chose, il avait beau venir du clan Terumi. Mako ne prenait pas de pincette pour le remettre à sa place, il haïssait ce genre de personnage. Ceux qui levaient la tête plus haut que leur cou le permettait juste parce qu’ils appartenaient à un clan influent ou autre, l’Onikiri se souvenait de ses années à l’académie durant lesquelles des membres de clan se vantaient ou utilisaient l’influence de leurs noms pour s’ériger en tant que véritable figure populaire au sein des autres enfants. Même si il ne l’avouait jamais, L’Onikiri prenait un plaisir fou à écraser les insectes de ce genre. Il aimait défier la pseudo-autorité qu’ils s’inventaient, il aimait les voir terrifiés en voyant que leur influence ne pouvaient pas tout gagner.

— La police secrète à son propre navire pour des raisons bien particulières, les ordres indiquent le Terumi donc applique les à l’avenir. Je suis sûr qu’un bon nombre de tes ‘’cousins’’ jalousent secrètement ta place et je me sens presque d’humeur généreuse. La prochaine fois respecte les ordres, je ne tolérerais pas un nouveau comportement de la sorte. Surtout lorsqu’il retarde une opération de cette importance en plus de retarder les plans du maître Mizukage.


Souffla l’Onikiri, la bouche ouverte à chacun de ses mots dévoilant une dentition tranchante que pouvait se partager bon nombre des habitants de ce pays. C’est vrai qu’il portait une très haute estime au Kage de Kiri. Cependant, tout le monde n’avait pas la même estime. Mako était du genre fanatique, il pourrait tuer sur simple mot de ce dernier car son cœur, son corps, ses pensées appartenaient au village de Kiri. Beaucoup pouvait voir en lui, une génération maudite probablement. Cependant certains éveillés ou d’autres portant en eux des rancunes passées pouvaient éprouver une certaine crainte, rien que le fait de citer son appellation pouvait en faire transpirer plus d’un.  Mako souriait légèrement en coin, il aurait aimé que les membres du clan Terumi gardent les pieds sur terre, ils avaient commencé à devenir véritablement problématique depuis que Meï Terumi, conseillère du Mizukage avait gagnée une influence énorme, propulsant le clan sur les devants de la scène. Elle avait même fait venir ce navire grotesquement imposant pour impressionner les autres.


L’Onikiri restait sur le pont entre les deux hommes, le logisticien avait l’air assez content de la prise de parole de l’enfant mandaté par le Kage. Le Terumi allait transporter assez de vivre pour que les soldats puissent tenir longtemps sur les terres prochaines, cela semblait être le bon choix pour l’Onikiri, il pouvait lire dans les yeux du marin une pointe de colère. L’enfant avait probablement touché à sa fierté, il venait de le réprimander devant les autres. Ici l’âge pouvait jouer un rôle, mais la force primait avant tout, du moins aux yeux de Mako. Peu importe l’âge, il aura toujours son mot à dire s’il estime qu’un faible risque d’entraîner une chute importante, c’était le cas du marin. Pendant que le chargement s’effectuait, Mako levait la tête histoire de regarder les autres navires. Les membres d’équipage du Hoshigaki au loin étaient visiblement en train de s’énerver, criant sur tout le monde, ils cherchaient quelque chose on dirait bien. L’Hozuki aussi ? Mako soupira, sa prochaine destination fut l’Hozuki, réalisant la même action ; Il montrait le parchemin du Mizukage afin qu’on puisse respecter son autorité et questionna l’un des membres d’équipage sur le problème.

Spoiler:

Les paroles de Mako suffirent à trembler le capitaine Terumi, peu habitué à ce qu’on soit aussi direct avec lui. A vrai dire, même le logisticien eu un sursaut en entendant les paroles de l’Onikiri, puis remis de sa surprise, eut un hochement de tête reconnaissant envers l’adolescent. Comprenant qu’il avait toutes les autorisations qu’il faut, le logisticien siffla ses hommes pour entreprendre le chargement du navire, sous le regard bouche-bé du responsable du bateau, bien impuissant. Le responsable des provisions eut un sourire, c’était gagné de ce côté-là. La suite du programme ; les Hozuki. Le gardien du navire plissa des yeux en voyant le parchemin, puis réalisant qui était en face de lui, la sentinelle rajusta immédiatement sa tenue, offrit le salut militaire qui s’imposait, puis fit un pas de côté en désignant le chef du navire.
Enfin, si on pouvait appeler ça un chef de navire : le capitaine du Hozuki est vautré sur une chaise, en train de ronfler comme un ours, une bouteille de saké à côté de lui. En voyant le tableau pitoyable qu’offrait son chef, le type de garde leva une main timide pour Mako, lui faisant signe de rester un peu avec lui. Très gêné par la gravité de la situation, il préférait encore négocier directement avec l’envoyé du Kage plutôt que de réveiller son chef ; il était soupe au lait et il hurlait comme un fou lorsqu’on l’empêchait de dégriser. Mieux valait se faire crier dessus par un gosse qu’il ne reverrait plus par la suite que de s’attirer les foudres de son chef à temps plein.

« Attendez, vous venez pour résoudre les problèmes du navire n’est-ce pas ? » Donner du vous à un gosse semblait idiot, mais dans une institution où seul compte le grade, ça pouvait se comprendre. « Le navire a besoin d’un nouveau set de rames et d’un éperon en bronze. De ce que m’a dit le capitaine, ils sont stockés dans un entrepôt avec le matériel dont ont besoin les Hoshigaki. Mais… » Parce qu’il y a toujours un mais, même chez les ninjas. La tradition veut que tout ce qu’il y avant un mais ne compte pas. « C’est notre chef qui a passé commande et sait à quel endroit sont entreposés les rames, l’éperon, la passerelle d’abordage et les voiles. Le capitaine est du genre soupe au lait et rancunier, si vous voulez éviter les ennuis, vous devriez peut-être demander à Mion, la capitaine du Hoshigaki, de le réveiller. » Chaque phrase qui passe, sa voix se fait plus petite encore, jusqu’à être un murmure. « Euh, sinon les oinins devraient pouvoir s’en charger, en général ils gardent un inventaire des entrepôts militaires. Ou alors, demander à Otsukai, la vice-amiral de la flotte. Elle aussi, elle doit avoir une solution. »